APPORT D’UN USUFRUIT A DUREE FIXE ET ABUS DE DROIT

13.10.23

I. Les faits

En mars 2003, la SCI [B] a été créée par ses deux associés, personnes physiques, à parts égales Monsieur [A] et Monsieur [C]. Cette SCI [S] relevait du régime des sociétés de personnes ou régime de la translucidité fiscale en application des dispositions de l’article 8 du CGI.

Par actes du 20 décembre 2010, les statuts de la SCI [B] ont été mis à jour afin d’entériner l’augmentation du capital social de 24 parts correspondant à la nomination de deux autres associés minoritaires, Messieurs [D] et [N], fils de l’associé [A].

Une société civile Holding [H] a alors été créée. A cette occasion, les quatre associés de la SCI ont chacun fait apport à la SC Holding [H] de l’usufruit pour une durée de dix ans de leurs parts dans le capital social de la SCI [B].

La société civile Holding [H] a opté, lors de sa création, pour l’imposition de ses résultats à l’impôt sur les sociétés.

A l’issue d’une vérification de comptabilité de la SC Holding [H] et de la SCI [B] au titre de la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016, l’administration a considéré, sur le fondement des dispositions de l’article L. 64 du LPF, eu égard aux conditions de fonctionnement de la SC Holding [H], que l’opération consistait en l’interposition d’une société dépourvue de consistance économique n’ayant d’autre but que celui d’éluder la charge fiscale à l’impôt sur le revenu des associés à raison des revenus fonciers de la SCI qui auraient dû être imposés entre les mains des associés fondateurs.

Elle a imposé en conséquence les associés à l’impôt sur le revenu et aux contributions sociales sur les résultats de la SCI.

II. La décision

Selon la Cour administrative de Lyon, il résulte des dispositions de l’article L 64 du LPF que, lorsque l’administration use des pouvoirs que lui confère ce texte dans des conditions telles que la charge de la preuve lui incombe, elle est fondée à écarter comme ne lui étant pas opposables certains actes passés par le contribuable, dès lors que ces actes ont un caractère fictif ou que, recherchant le bénéfice d’une application littérale des textes à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n’ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d’éluder ou d’atténuer les charges fiscales que l’intéressé, s’il n’avait pas passé ces actes, aurait normalement supportées, eu égard à sa situation ou à ses activités réelles.

En l’espèce, pour démontrer l’abus de droit, l’administration a estimé que l’interposition de la société civile [H] relevait d’un montage juridique et économique artificiel. Pour ce faire, elle a relevé que cette société, qui a pour objet la gestion d’un portefeuille de participations incluant toute opération financière, mobilière ou immobilière, n’a justifié depuis sa création, au titre de ses immobilisations, que de la détention des parts détenues en usufruit dans la SCI [S] et n’a réalisé aucune transaction financière en lien avec son objet.

Si les associés de la société civile [H] se prévalaient de cinq attestations démontrant, selon eux, la réalité de recherches d’investissements menées par eux, il est estimé que les attestations produites évoquaient de façon non circonstanciée des négociations n’ayant pas abouti pour acquérir différents complexes touristiques sans que celles-ci ne permettaient de conclure avec certitude, que les recherches avaient bien été menées par les associés pour le compte de la société civile [H] et non pour le compte d’une autre société que ces derniers détenaient également.

Pour les juges ces attestations ne suffisent pas à démontrer l’existence d’une activité de gestion de titres de la part de la société civile [H] ni même d’une réelle volonté de débuter une telle activité. L’administration a également relevé que, depuis sa création, [H] ne disposait ni de compte bancaire, ni de comptabilité et qu’elle n’avait tenu aucune assemblée générale.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, l’administration était ainsi fondée à considérer que la société civile [H] était dénuée de substance économique et que sa création ne répondait pas à un motif économique, financier ou patrimonial.

III. Concrètement

Les avis du Comité de l’abus de droit fiscal et la jurisprudence sont constants sur ce sujet.

Par cette affaire la jurisprudence illustre une nouvelle fois qu’un montage dépourvu de substance économique et n’ayant aucun autre but que celui d’atténuer la charge fiscale des associés est constitutif d’un abus de droit.

IV. Source

CAA Lyon n°21LY01699 09/02/2023

Par Excen Notaires & Conseils

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