I. Les faits
La SCI [X] a fait l’objet d’un contrôle sur pièces, à la suite duquel l’administration a considéré que la SCI [X] relevait de l’impôt sur les sociétés, estimant qu’elle percevait des loyers de la location en meublé de la maison dont elle est propriétaire.
La location meublée concernait une durée d’un mois au cours de chacune des années 2007, 2008 et 2009. La maison était proposée à la location par le biais d’annonces parues sur un site internet de locations immobilières.
La location meublée ayant un caractère habituel (à l’époque des faits, la location meublée occasionnelle ou accidentelle pouvait relever du régime des revenus fonciers), elle constituait des bénéfices industriels et commerciaux représentant plus de 10% du chiffre d’affaires. Dès lors, la SCI était passible de l’IS en application des dispositions de l’article 206 2° du CGI.
La SCI [X] conteste son assujettissement à l’IS au motif que la maison était louée nue aux époux [C], associés minoritaires de la SCI, via des baux allant du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008 et du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2011 dont il résulte des termes que le bien a été donné à l’état nu.
II. La décision
La Cour souligne que la durée de la location des locaux est sans incidence sur le caractère habituel et non occasionnel de l’activité de location, lequel résulte de ce que les locaux meublés ont été loués à plusieurs reprises.
Toutefois, la Cour relève :
- Que le bien détenu par la SCI [X] était loué nu aux époux [C]
- Que les époux [C], locataires du bien, avaient garni le bien de meubles
- Que les époux [C] avaient immédiatement déclaré les revenus tirés de la sous-location comme des revenus passibles de l’impôt sur le revenu.
De plus, la Cour administrative d’appel souligne que l’administration se bornait à soutenir le contraire en formulant de simples assertions non étayées.
La Cour estime que la circonstance invoquée par l’administration selon laquelle la sous-location n’était pas prévue au bail, si elle a une incidence sur les relations entre la société propriétaire et ses locataires, est néanmoins sans influence sur la détermination de la personne ayant encaissé les sommes issues des locations de l’immeuble.
Dans ces conditions, il est décidé que la SCI était fondée à soutenir qu’elle ne pouvait être regardée comme exerçant une activité commerciale au sens de l’article 34 du CGI et que par suite, elle n’était pas redevable de l’impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2008 et 2009 à raison des loyers procurés par la location nue de cet immeuble.
III. Concrètement
Avant le 1er janvier 2017, une société civile donnant habituellement en location des locaux garnis de meubles doit être regardée comme exerçant une activité commerciale au sens de l’article 34 du CGI, dès qu’elle avait un caractère habituel et non occasionnel, de sorte que la durée de la location était sans incidence.
Depuis le 1er janvier 2017, en application des dispositions du 5° bis de l’article 35 du CGI, les revenus de la location meublée sont imposés dans la catégorie des BIC que l’activité soit occasionnelle ou habituelle.
Ainsi, avant 2017, une SCI pouvait continuer à relever du régime des sociétés de personnes, quand bien même, elle avait des revenus d’une activité de location en meublé occasionnelle. Depuis le 1er janvier 2017, l’assujettissement à l’impôt sur les sociétés est inéluctable dès lors que les recettes de la location meublée (occasionnelle ou habituelle) excèdent 10% du chiffre d’affaires de la société civile.
Dans l’affaire jugée par la Cour administrative d’appel de Marseille, l’administration considérait que la location nue consentie par la SCI au profit d’un preneur qui meuble le bien et le donne en location meublée constituait une activité de location meublée indirecte, relevant par la même occasion des BIC et donc assujettissant la société civile à l’IS.
Bien que plusieurs décisions jurisprudentielles antérieures ont validé l’analyse du fisc par le passé, la CAA considère ici qu’il ne s’agit pas d’une location meublée indirecte mais d’une location nue relevant des revenus fonciers. On se réjouit donc de la position prise par la CAA de Marseille.
Cependant, à nos yeux, cette solution n’a pas vocation à bénéficier d’une application universelle. L’examen des faits propres à chaque espèce étant déterminant. Conseiller la mise en place d’un tel schéma peut s’avérer dangereux.
Enfin on attendra avec intérêt l’analyse du Conseil d’Etat dans l’hypothèse d’un pourvoi en cassation.
IV. Source
CAA Marseille n°21MA00318 31/03/2023
Par Excen Notaires & Conseils