I. Les faits
Les époux [X], mariés sous un régime de communauté, sont respectivement décédés les 6 octobre 2001 et 23 décembre 2013. A leur succession, sont appelés leurs enfants, Monsieur [L], Monsieur [G] et Madame [I].
Les 25 avril et 2 mai 2016, Madame [I] a fait valoir une action en déclaration de simulation afin que ses frères réunissent à la succession des parents les donations dissimulées dans d’autres actes.
Nota : L’action en déclaration de simulation a pour objet de démontrer qu’un acte a créé une fausse apparence. Elle permet de rétablir la véritable qualification de l’acte. Cette action en justice ouverte aux tiers peut être engagée par toute personne qui se verrait opposer l’acte simulé, aux fins d’obtenir qu’il ne soit tenu compte que de l’acte effectif pour ce qui concerne ses intérêts.
La Cour d’appel de Grenoble a rejeté la demande de Madame [I] considérant que l’action en déclaration de simulation était prescrite au jour de la demande. En effet, la Cour d’appel estime que la prescription relative à l’action en déclaration court à compter du premier décès des donateurs, donc celui de la mère. Dès lors, selon la Cour d’appel, l’action en déclaration de simulation était donc prescrite le 19 juin 2013.
Madame [I] s’est alors pourvue en cassation.
II. La décision
La Cour de cassation rappelle qu’en application de l’article 920 du Code civil, les libéralités, directes ou indirectes, qui portent atteinte à la réserve d’un ou plusieurs héritiers, sont réductibles à la quotité disponible lors de l’ouverture de la succession.
De plus, en application du second alinéa de l’article 921 et de l’article 1438 du même code, sauf clause contraire, la donation de biens communs est réputée consentie à concurrence de moitié par chacun des époux, de sorte que sa réduction ne peut être demandée par leurs enfants communs qu’à due proportion, à l’ouverture de chacune des successions des co-donateurs.
En l’espèce, la donation portant sur des biens communs, la Cour de cassation estime ici qu’il convient d’apprécier indépendamment la donation réalisée par chacun des parents. Ainsi, la prescription relative à la donation consentie par la mère décédée le 6 octobre 2001 était de 30 ans mais sa durée a été ramenée à 5 ans à compter du 19 juin 2008, soit le 19 juin 2013.
En revanche, l’action en déclaration de simulation relative à la donation consentie par le père se prescrit 5 ans après le décès de ce dernier, soit le 23 décembre 2018.
Madame [I] était donc en droit d’engager une action en déclaration de simulation au titre de la donation consentie par son père.
III. Concrètement
Dès lors qu’une donation porte sur des biens communs, chaque époux est considéré comme donateur. Ainsi, la réunion fictive, et l’éventuel rapport, s’effectue en deux temps, pour moitié lors de la liquidation de la succession de chacun des donateurs.
IV. Source
Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 5 janvier 2023, 21-13.151
Par Excen Notaires & Conseils