Pour la première fois, la loi de finances n’a pas pu être adoptée avant la fin de l’année 2024, en raison de la démission du Gouvernement Barnier. À la suite de cet événement, le projet de loi de finances a été présenté en janvier au Sénat par le Gouvernement Bayrou. Ce texte a été voté le 6 février 2025. L’examen de ce texte législatif permet de présenter un aperçu des mesures principales de cette loi.
Fiscalité de la transmission patrimoniale
A. Exonération de la donation de somme d’argent destinée à l’acquisition d’un bien immobilier dans le neuf et la rénovation énergétique de la résidence principale
Une exonération de 100 000 € a été instaurée dans la loi de finances pour 2020, concernant les dons de sommes d’argent. Cette exonération s’appliquait sous condition que les fonds soient utilisés pour la construction de la résidence principale ou pour la réalisation de travaux de rénovation énergétique, dans le but de soutenir les secteurs de la construction et de la rénovation immobilière. Cependant, cette mesure a pris fin le 30 juin 2021. Dans un esprit similaire, le législateur a renouvelé cette exonération dans la loi de finances pour 2025.
Désormais, les dons d’argent effectués en faveur d’un enfant, petit-enfant, ou, à défaut, de neveux ou nièces, bénéficient d’une exonération de droits de donation à hauteur de 100 000 € par donataire à condition que :
-Les fonds soient utilisés pour l’acquisition d’un immeuble dans le neuf ou la réalisation de travaux de rénovation énergétique de la résidence principale, et ce, dans un délai de 6 mois après la donation ;
-L’immeuble ayant bénéficié de cette somme doit servir de résidence principale au donataire ou être affecté à la location à usage d’habitation principale pendant une période minimale de 5 ans.
Cette exonération présente trois limites :
-Le donataire peut bénéficier de ce dispositif une seule fois par donateur.
-Cette exonération est limitée à 300 000 € par donataire.
-Cette exonération est valable uniquement jusqu’au 31 décembre 2026.
B. Augmentation des seuils d’exonération pour la donation des parts sociales de GFA et des biens soumis à un bail rural à long terme
Les parts de GFA (Groupement Foncier Agricole) et les biens ruraux loués à long terme bénéficient d’une exonération partielle lorsqu’ils sont transmis par donation. Ainsi, si le donataire s’engage à conserver le bien transmis :
-Pendant 5 ans, 75 % de la valeur vénale est exonérée, dans la limite de 300 000 €, et 50 % au-delà de ce montant.
-Pendant 10 ans, 75 % de la valeur vénale est exonérée, dans la limite de 500 000 €, et 50 % au-delà de ce montant.
Cette mesure fiscale a été modifiée par la loi de finances pour 2025 dont la principale évolution est l’augmentation des seuils. Désormais, si le donataire s’engage à conserver le bien transmis :
-Pendant 5 ans, 75 % de la valeur vénale est exonérée, dans la limite de 600 000 €, et 50 % au-delà de ce montant.
-Pendant 18 ans, 75 % de la valeur vénale est exonérée, dans la limite de 20 000 000 €, et 50 % au-delà de ce montant.
Fiscalité immobilière
A. Un traitement préférentiel de la résidence principale pour les primo-accédants
1. Une potentielle réduction des frais d’acquisition
Les frais d’acquisition sont composés de plusieurs éléments :
-Les débours : ce sont les frais avancés par le notaire pour le dossier, tels que les frais administratifs ou les coûts liés à l’obtention de documents ;
-Les émoluments : il s’agit de la rémunération du notaire pour ses services ;
-Les taxes : elles représentent généralement la moitié des frais de notaire.
Parmi ces taxes, la taxe sur la publicité foncière et les droits d’enregistrement sont déterminés par le conseil départemental.
La loi de finances pour 2025 offre la possibilité à ce conseil de réduire ou exonérer de taxe de publicité foncière ou de droits d’enregistrement les acquisitions immobilières réalisées par des primo-accédants. Cependant, ces derniers devront conserver le bien en tant que résidence principale pendant une période de 5 ans à compter de l’acquisition.
2. Élargissement national du PTZ
Le prêt à taux zéro (PTZ), créé en 1995, est un prêt immobilier destiné à aider à l’acquisition de la résidence principale pour les personnes n’ayant pas été propriétaires de leur résidence principale au cours des deux dernières années. Ce prêt, comme son nom l’indique, est à taux d’intérêt zéro, ce qui signifie qu’aucun intérêt n’est à payer sur la somme empruntée.
Pour en bénéficier, les emprunteurs doivent respecter des critères de revenus ainsi que des conditions liées à la localisation du bien. Dans le cadre de la relance du marché immobilier et pour encourager les primo-accédants à investir dans leur résidence principale, la loi de finances pour 2025 supprime la condition de localisation du bien pour les opérations réalisées entre le 1er janvier 2025 et le 31 décembre 2027.
B. Alourdissement de la fiscalité immobilière
1. Une hausse des frais d’acquisition
La loi de finances pour 2025 permet au conseil départemental d’augmenter les droits de mutation à titre onéreux de 0,5 %. Ainsi, le taux maximum des droits de mutation passe de 5,807 % à 6,319 % pour les cessions de biens immobiliers.
2. Une plus-value immobilière augmentée pour les locations meublées non professionnelles (LMNP)
En règle générale, la plus-value brute est déterminée par la différence entre le prix de cession et le prix d’acquisition du bien. Or, la loi de finances modifie ce calcul pour les cessions de biens issus de la location meublée non professionnelle, et ce, à compter du 1er janvier 2025. Ce calcul réintègre les amortissements pratiqués. Cette modification consiste à déduire les amortissements déduits du prix d’acquisition. La conséquence directe de cette mesure fiscale est d’augmenter le montant de la plus-value brute. Toutefois, le régime fiscal concernant la cession d’une location meublée non professionnelle reste avantageux, notamment en raison de l’application du régime des plus-values immobilières (abattement pour durée de détention, prise en compte des travaux et des frais d’acquisition).
PV brute = Prix de cession – (Prix d’acquisition corrigé – Amortissements déduits)
Données | |
Prix de cession | 400 000 € |
Prix d’acquisition corrigé | 200 000 € |
Montant des amortissements déduits | 100 000 € |
La plus-value brute = 400 000 € – (200 000 € – 100 000 €)
= 400 000 € – 100 000 €
= 300 000 €
Avant la loi de finances pour 2025, la plus-value brute imposable était de 200 000 €. Depuis la réintégration des amortissements dans le calcul, cette plus-value brute imposable passe à 300 000 €, ce qui représente une augmentation de 100 000 €.
Fiscalité des chefs d’entreprises
A. Abaissement uniforme du seuil d’éligibilité à la TVA
Les entreprises dont le chiffre d’affaires était inférieur à 85 000 € pour la vente de biens et à 37 500 € pour les prestations de services (autres que la vente de produits à consommer sur place et les prestations d’hébergement) étaient dispensées de TVA pour l’année en cours.
Cette mesure fiscale a été modifiée par la loi de finances afin de se conformer au droit de l’Union européenne et d’améliorer les recettes de l’État. Désormais, seules les entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 25 000 € pourront continuer à bénéficier de cette exonération de TVA, sans distinction entre ventes de biens et prestations de services.
Cette révision entraîne l’éligibilité à la TVA pour de nombreuses petites entreprises. Par conséquent :
-Elles pourront récupérer la TVA et devront effectuer des déclarations régulières, ce qui implique une gestion comptable plus rigoureuse.
-Elles devront ajuster les prix de leurs biens et services pour répondre à cette nouvelle obligation fiscale, afin de maintenir leurs marges.
B. Maintien de l’abattement de 500 000 € pour départ à la retraite
Lorsqu’un dirigeant de PME cède les titres de sa société en raison de son départ à la retraite, il peut bénéficier d’un abattement de 500 000 € sur la plus-value réalisée. Ce dispositif, instauré par la loi de finances pour 2018, devait initialement prendre fin au 31 décembre 2024. La loi de finances pour cette année a prolongé cette mesure de faveur. Ainsi, les dirigeants partant à la retraite pourront encore en bénéficier jusqu’au 31 décembre 2031.
C. Nouveau régime fiscal pour les gains de cession des managements packages
Les managements packages permettent aux salariés et dirigeants d’acquérir des parts dans le capital d’une entreprise, dans le but de les motiver et les fidéliser, en alignant leurs intérêts avec ceux de l’entreprise. Il peut se décliner sous diverses formes, telles que les stock-options, les actions gratuites les bons de souscription et les actions de préférence.
Le régime fiscal de certains de ces mécanismes a été modifié par la loi de finances de cette année. Désormais, le gain de cession n’est plus systématiquement soumis à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires, qui peut atteindre un taux de 45 %, auquel s’ajoutait potentiellement une contribution exceptionnelle sur les hauts revenus (CEHR) de 10 %. Dans certaines situations, ce gain peut être soumis à une imposition en tant que plus-value mobilière, avec un taux réduit de 12,8 % dans le cadre du prélèvement forfaitaire unique (PFU) et être éventuellement soumis à la CEHR.
Fiscalité des personnes fortunées
Création de la contribution différentielle pour les hauts revenus
La loi de finances pour 2025 a créé un nouvel impôt appelé la contribution différentielle. Celle-ci est destinée à imposer les personnes domiciliées fiscalement en France ayant des revenus élevés.
Sont concernés les contribuables dont le revenu fiscal de référence est :
-De 250 000 € pour un célibataire, veuf, séparé, divorcé,
-De 500 000 € pour un couple de contribuables.
Cette contribution consiste à ce que les foyers fiscaux à hauts revenus soient soumis à une imposition minimale de 20 %.
Par exemple :
Un couple a un revenu fiscal de 600 000 €.
Si le total de leur impôt sur le revenu et de leur cotisation à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus est inférieur à 120 000 € (soit 600 000 € x 20 %), ils seront soumis à la contribution différentielle sur les hauts revenus afin d’atteindre un taux d’imposition minimal de 20 %.
Par Océane SUBE, Ingénieure patrimoniale, Docteur en droit