I. Les faits : « Société civile : opérations d’achat-revente »
La Société civile [M] a été créée en mars 1999. Elle avait pour objet social l’acquisition, la vente, la gestion et l’administration de tout immeuble ou biens et droits immobiliers (opérations d’achat-revente).
La SCI [M] a effectué 6 achats et procédé à 10 ventes de biens immobiliers entre 2001 et 2016, sachant qu’aucune transaction n’a été opérée par la société entre 2011 et 2016. En effet, la SCI [M] avait acquis, en janvier 2008, une parcelle de 5 517 mètres carrés comprenant deux maisons à usage d’habitation qui ont été louées jusqu’à leur vente. Après une division parcellaire et différents travaux, elle a vendu, en juin 2011, une maison sur un terrain de 1 000 mètres carrés. Le reste de la parcelle a fait l’objet, entre novembre 2011 et avril 2016, date de la vente sous forme de terrain à bâtir d’un lot représentant 3 529 mètres carrés, du dépôt d’une déclaration préalable de division, d’une déclaration préalable de création de 2 lots, de 4 demandes de permis de construire par deux sociétés différentes et de 7 déclarations d’intention d’aliéner auprès de trois sociétés distinctes.
De plus, 3 autres biens immobiliers, acquis par la SCI [M] en janvier 2005, en juin 2005 et en avril 2006 ont été par ailleurs revendus dans de brefs délais, le cas échéant après division parcellaire.
Monsieur [A], associé à hauteur de la moitié des parts et cogérant de la société, a par ailleurs réalisé 4 opérations d’achats et 6 opérations de ventes portant sur des maisons ou des terrains à bâtir entre 2004 et 2018.
L’administration a considéré que la SCI [M] avait une activité commerciale de marchand de biens, elle a donc assujetti de plein droit la SCI [M] à l’impôt sur les sociétés et a imposé les prélèvements effectués par Monsieur [A] dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
En novembre 2022, le TA de Toulouse a confirmé le redressement. Monsieur [A] a alors interjeté appel de la décision.
II. La décision
Les juges estiment que, compte tenu du nombre des transactions conduites pendant plusieurs années et de l’activité exercée par A, la cession réalisée en 2016 par la SCI [M] a revêtu un caractère habituel.
La circonstance qu’aucune transaction n’a été opérée par la société entre 2011 et 2015 n’est pas suffisante pour remettre en cause ce caractère. En effet, l’absence de revente s’explique par la réalisation d’opérations de division parcellaire et par le contexte économique, 7 déclarations d’intention d’aliéner avaient été déposées durant la période.
Ainsi, en dépit de la location des deux maisons et de la longueur du délai séparant la date d’acquisition du bien et celle de sa revente, la CAA estime que la SCI [M] a procédé, conformément à son objet social, à cette acquisition dans une intention spéculative.
Il en résulte que la SCI [M] s’est livrée à une activité de marchand de biens entrant dans le champ des dispositions précitées du I de l’article 35 du CGI.
C’est donc à bon droit qu’en application du 2 de l’article 206 du même code, l’administration, qui, en tenant compte de transactions effectuées au cours d’exercices prescrits, a assujettie la SCI [M] à l’impôt sur les sociétés au titre des exercices clos les 31 décembre 2015, 2016 et 2017, non couverts par la prescription.
III. Concrètement
En application des dispositions de l’article 35 du CGI, présentent le caractère de bénéfices industriels et commerciaux, pour l’application de l’impôt sur le revenu, les bénéfices réalisés par les personnes qui, habituellement, achètent en leur nom, en vue de revendre, des immeubles.
En vertu du 2 de l’article 206 du CGI définissant le champ d’application de l’impôt sur les sociétés, les sociétés civiles sont également passibles dudit impôt si elles se livrent à une exploitation commerciale ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 du même code.
L’application de ces dispositions est subordonnée à la double condition que les opérations procèdent d’une intention spéculative et présentent un caractère habituel. La condition d’habitude s’apprécie en principe en fonction du nombre d’opérations réalisées et de leur fréquence.
La circonstance qu’au cours d’une année aucune opération mentionnée à l’article 35 du CGI n’ait été réalisée par une société civile ne suffit pas, à elle seule, à écarter l’application de ces dispositions pour cette année.
Lorsque les associés qui jouent un rôle prépondérant ou bénéficient principalement des activités de la société sont des personnes qui se livrent elles-mêmes, de façon habituelle, à des opérations d’achat et de revente en l’état d’immeubles, la société étant l’un des instruments d’une activité d’ensemble entrant dans le champ d’application du 1° du I de l’article 35 du CGI, doit être réputée remplie la condition d’habitude posée par ce texte.