I. Les faits
L’enrichissement sans cause ne peut être étudié à titre subsidiaire : Monsieur [G] et Madame [B] étaient mariés sous le régime de la séparation de biens depuis octobre 2008.
Leur divorce par consentement mutuel a été prononcé par un jugement de décembre 2014 qui a homologué leur convention portant règlement des effets du divorce.
Cependant, en juillet 2017, Madame [B] a assigné Monsieur [G] afin de faire valoir une créance entre époux d’un montant de 80 000 € en raison d’un prêt consenti et non encore remboursé.
Madame [G] a fait valoir, à sa demande principale, une demande subsidiaire fondée sur l’enrichissement sans cause.
La Cour d’appel de Douai a rejeté la demande afférente à l’existence d’un prêt considérant que l’obligation de restitution n’était pas caractérisée. La Cour a également rejeté la demande relative à l’enrichissement sans cause considérant que cette notion ne permettait pas de contourner l’absence de preuve suffisante d’une obligation de restitution au titre du remboursement d’un prêt.
Madame [G] s’est alors pourvue en cassation considérant que le rejet de la demande afférente à l’existence d’un prêt ne pouvait pas rendre irrecevable la demande relative à l’enrichissement sans cause.
II. La réponse
La Cour de cassation a estimé que Madame [B] n’apportait pas la preuve du contrat de prêt qui constituait le fondement de son action principale. Dès lors, la Cour d’appel en a exactement déduit qu’elle ne pouvait pallier sa carence dans l’administration de cette preuve par l’exercice subsidiaire d’une action au titre de l’enrichissement sans cause.
Le pourvoi de Madame [B] a donc fait l’objet d’un rejet.
III. Concrètement
La Cour de cassation reste intransigeante sur cette question et maintient son cap jurisprudentiel. L’enrichissement sans cause n’est pas un moyen pouvant être invoqué à titre subsidiaire.
La requérante aurait dû faire un choix entre la revendication d’une créance et un enrichissement sans cause. Vouloir jouer simultanément sur les deux tableaux n’est pas admis.
L’enrichissement sans cause est une notion régie par les dispositions des articles 1303 à 1303-4 du Code civil :
- L’enrichissement qui n’a pas de cause trouve à s’appliquer s’il ne résulte pas d’une obligation par l’appauvri (dette, obligation alimentaire…), ni d’une intention libérale de l’appauvri (donation, legs) (article 1303-1 du Code civil) ;
- Il n’y a pas d’enrichissement sans cause si l’appauvrissement procède d’un acte accompli par l’appauvri en vue d’un profit personnel (article 1303-2 du Code civil) ;
- L’enrichissement sans cause conduit à une indemnité égale à la plus faible des deux valeurs entre l’enrichissement du bénéficiaire et de l’appauvrissement du débiteur (article 1303 du Code civil) ;
- L’appauvrissement constaté au jour de la dépense, et l’enrichissement tel qu’il subsiste au jour de la demande, sont évalués au jour du jugement (article 1303-4 du Code civil) ;
- En cas de mauvaise foi de l’enrichi, l’indemnité due est égale à la plus forte de ces deux valeurs (article 1303-4 du Code civil) ;
- L’indemnisation peut être modérée par le juge si l’appauvrissement procède d’une faute de l’appauvri (article 1303-2 du Code civil).
Pour récap : Dans une affaire opposant Madame [B] et Monsieur [G], divorcés, Madame [B] a réclamé une créance de 80 000 €, invoquant un prêt non remboursé. En l’absence de preuve suffisante de ce prêt, elle a tenté de faire valoir une demande subsidiaire fondée sur l’enrichissement sans cause. La Cour d’appel de Douai et la Cour de cassation ont rejeté cette demande, rappelant que l’enrichissement sans cause ne peut être utilisé comme recours subsidiaire pour combler un manque de preuve. Selon la jurisprudence, il est impossible de revendiquer à la fois une créance et un enrichissement sans cause.