I. La question
Les dispositions de l’article 1691 bis du CGI prévoient que les époux et partenaires sont tenus solidairement au paiement de l’impôt sur le revenu, dans le cas d’une imposition commune, ainsi que de la taxe d’habitation.
La parlementaire souligne le fait que lors d’un divorce ou d’une séparation, ces derniers demeurent solidaires des sommes dues lors de leur union et selon elle, certaines circonstances peuvent faire peser illégitimement une dette fiscale sur l’un des membres du couple, des années après. C’est, par exemple le cas lorsque l’un des anciens conjoints voit ses revenus réintégrés par l’administration fiscale après dissimulation et que la solidarité fiscale est revendiquée.
La loi de finances pour 2008 a prévu au II de l’article 1691 bis du CGI, un mécanisme de décharge fiscale. Toutefois, selon la députée ce mécanisme méconnaît les situations individuelles et est source d’injustices, notamment pour les femmes divorcées qui, parfois, se voient contraintes de sacrifier leur patrimoine pour rembourser les dettes de leur ex-conjoint, sans que le comportement indélicat de ce dernier ne soit pris en compte.
Aussi la députée souhaitait disposer des données chiffrées sur les décharges fiscales accordées et être informée sur les éventuels projets des pouvoirs publics.
II. La réponse
Le ministre rappelle que les couples mariés ou pacsés étant soumis à l’impôt sur le revenu de manière conjointe, la solidarité de paiement en est le corollaire et constitue l’une des garanties de l’effectivité du recouvrement de la contribution commune aux charges publiques.
Le divorce ou la séparation ne peut mettre fin de manière quasi-automatique à la solidarité fiscale au titre de la période d’imposition commune, sauf à créer une rupture d’égalité devant les charges publiques entre les contribuables ayant une dette fiscale et poursuivant leur vie commune d’une part, et ceux supportant la même dette fiscale mais séparés ou divorcés d’autre part.
Le législateur a entendu concilier la garantie du recouvrement des créances fiscales, à laquelle contribue la solidarité de paiement entre époux ou partenaires de PACS, avec la prise en compte des difficultés financières et des conséquences patrimoniales pouvant naître, pour l’un ou l’autre des conjoints divorcés ou séparés, de cette solidarité de paiement pour la période antérieure au divorce ou à la séparation.
Le droit à décharge de responsabilité solidaire (DRS) au profit de l’ex-conjoint ou de l’ex-partenaire lié par un PACS tenu au paiement de l’impôt sur le revenu, de la taxe d’habitation et de l’IFI.
La condition de disproportion marquée vise à prendre en compte les difficultés financières et patrimoniales du demandeur. L’examen de l’existence d’une telle disproportion s’effectue d’abord au regard de la situation patrimoniale, en excluant la résidence principale, quelle qu’en soit sa valeur, et ce afin de sauvegarder le toit des personnes divorcées et délaissées. La disproportion est considérée comme marquée si la situation financière du demandeur à la date de la demande ne permet pas d’envisager un plan de règlement de la dette fiscale, nette de la valeur du patrimoine, dans un délai fixé à 3 ans.
L’appréciation qui est faite, au cas par cas, par l’administration sur la disproportion marquée peut être soumise au contrôle du juge administratif garant d’une équité de traitement des demandeurs.
Dans l’hypothèse où les conditions fixées par l’article 1691 bis-II du CGI sont remplies, le demandeur bénéficie d’une décharge de son obligation de paiement au titre de la fraction de cotisation d’impôt correspondant aux revenus de son conjoint et à la moitié des revenus communs. En outre, la décharge des intérêts de retard et des pénalités d’assiette est prononcée en totalité s’ils sont consécutifs à la rectification de bénéfices ou de revenus propres au conjoint.
Enfin, le III de l’article 1691 bis du CGI prévoit la possibilité pour le redevable qui a été déchargé partiellement de son obligation de paiement en vertu des dispositions du II de l’article 1691 bis du CGI, de déposer, simultanément ou postérieurement à la demande de décharge, une demande tendant à obtenir la remise gracieuse de la quote-part maintenue à sa charge lorsqu’il se trouve en situation de gène ou d’indigence (cf. article L. 247 du LPF).
Bercy estime qu’en l’état, le dispositif répond à ces objectifs et paraît équilibré et n’envisage aucune évolution.
En 2022, 245 demandes de décharge de solidarité ont été traitées et 100 ont été octroyées.
III. Concrètement
Depuis 2008, la loi offre aux personnes divorcées ou séparées la possibilité de solliciter une décharge de paiement auprès de l’administration fiscale (qui peut être rejetée puis soumise à un recours).
À la date de la demande, leur situation doit correspondre à l’une des quatre situations suivantes :
- Le jugement de divorce ou de séparation de corps a été prononcé ou la convention de divorce par consentement mutuel prenant la forme d’un acte sous signature privée contresigné par avocats a été déposée au rang des minutes d’un notaire ;
- La déclaration conjointe de dissolution du pacte civil de solidarité établie par les partenaires ou la signification de la décision unilatérale de dissolution du pacte civil de solidarité de l’un des partenaires a été enregistrée au greffe du tribunal judiciaire ;
- Les intéressés ont été autorisés à avoir des résidences séparées ;
- L’un ou l’autre des époux ou des partenaires liés par un pacte civil de solidarité a abandonné le domicile conjugal ou la résidence commune.
La loi a prévu trois conditions :
- La rupture de la vie commune ;
- Le respect des obligations fiscales du demandeur ;
- Et la disproportion entre la dette fiscale et la situation financière et patrimoniale du demandeur.
« La décharge de l’obligation de paiement est accordée en cas de disproportion marquée entre le montant de la dette fiscale et, à la date de la demande, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur ».
Cette dernière notion, la situation financière et patrimoniale, nette de charges, du demandeur, correspond à sa capacité de remboursement au regard des ressources dont il dispose à la date de la demande. Les charges prises en compte comprennent les impôts et taxes de l’année courante, le montant du loyer ou les mensualités de remboursement, les pensions alimentaires, les factures d’énergie et de façon générale, toutes les charges de vie courante.
IV. Source
RM LE HENAFF n° 8417 JOAN 07/05/2024
Par Excen Notaires & Conseils