I. Les faits
Monsieur [W] et Madame [L] étaient mariés sous le régime de la séparation de biens. Leur divorce a été prononcé par un jugement de juin 2003.
Dans le cadre du partage réalisé en octobre 2003, Monsieur [W] s’est vu attribuer un immeuble indivis moyennant le paiement d’une soulte à Madame [L]. Le partage a tenu compte d’une créance de Monsieur [W] contre l’indivision d’un montant de 129 582 €, au titre du financement de travaux de réhabilitation de l’immeuble au moyen de ses deniers personnels. L’immeuble était estimé à dire d’expert à 430 000 € au jour du partage.
L’immeuble a ensuite été cédé un an plus tard pour une somme supérieure à celle retenue à l’acte de partage.
Madame [L] a assigné Monsieur [W] en lésion.
La Cour d’appel a donné raison à Madame [L] qui avait été lésée de ses droits de plus d’un quart par l’acte de partage. Elle a condamné Monsieur [W] à payer un supplément à l’acte de partage de 116 099 €.
Monsieur [W] a contesté cette décision et s’est donc pourvu en cassation. En effet, il a considéré que la créance avait été évaluée à tort au nominal, et qu’il convenait de constater l’éventuelle lésion en tenant compte d’une créance réévaluée selon la méthode du profit subsistant.
II. La décision
La Cour de cassation rappelle qu’en application des dispositions du premier alinéa de l’article 815-13 et l’alinéa 2 de l’article 887 du Code civil, pour apprécier le caractère lésionnaire d’un partage, il convient d’avoir égard à la liquidation et au règlement d’ensemble des droits des copartageants, en reconstituant, à la date de l’acte litigieux, la masse à partager dans tous ses éléments actifs et passifs estimés suivant leur valeur à l’époque du partage.
Or, lorsqu’un indivisaire a amélioré à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l’équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage.
Dès lors, il est jugé que la Cour d’appel a commis une erreur en refusant de tenir compte de la créance détenue par Monsieur [W] contre l’indivision pour sa valeur réévaluée. Le caractère lésionnaire du partage devait donc être apprécié sur la base de cette créance calculée selon la méthode du profit subsistant.
III. Concrètement
Parmi les créances détenues par un indivisaire contre l’indivision, nous pouvons lister les créances relatives aux dépenses de conservation nécessaire, d’amélioration et de gestion.
La Cour de cassation a déjà statué sur la détermination de la créance relative aux dépenses de conservation nécessaire selon le principe du profit subsistant (Cass. 1ère civ., 11 mai 2012, n° 11-17.497).
Ici, la Cour de cassation réitère l’application du même principe aux dépenses d’amélioration, confirmant sa jurisprudence antérieure (Cass. 1ère civ., 15 mai 2008, n° 07-17.645 et Cass. 1ère civ. , 24 septembre 2014, n° 13-18.197)
N’oublions pas toutefois la gestion de la prescription pour faire valoir la créance. En effet, la prescription de droit de commun de 5 ans trouve à s’appliquer (C. civ. Art. 2224).
Le point de départ de la prescription est :
- Le jour de la dépense pour les dépenses de conservation nécessaires (Cass. 1ère civ., 14 avril 2021 n° 19-21.313) ;
- Le jour du partage pour les dépenses d’amélioration.
IV. Source
Cass. 1ère civ. n°21-25.051 25/10/2023
Par Excen Notaires & Conseils