I. Les faits
Madame [E] et Monsieur [W], qui ont vécu en concubinage, étaient propriétaires d’un immeuble construit sur un terrain appartenant à Madame [E]. Cette dernière a ensuite cédé la moitié du terrain à Monsieur [W] par dation en paiement. Madame [E] a enfin assigné Monsieur [W] en partage de l’indivision.
Dans le cadre de ce partage, Monsieur [W] estimait que Madame [E] était débitrice envers l’indivision en raison du travail effectué par lui mais également en raison des dépenses qu’il avait effectuées pour l’achat de divers matériaux.
La Cour d’appel d’Orléans a rejeté la demande de Monsieur [W] au motif qu’il n’a pas qualifié la nature des travaux réalisés, ni chiffré le montant de la créance.
II. La décision
La Haute Cour rappelle que les juges du fond doivent donner une qualification exacte aux faits et actes litigieux. En rejetant la demande de Monsieur [W] au titre des travaux qu’il avait personnellement financés et réalisés sur l’immeuble indivis aux motifs que ce dernier ne précisait pas le fondement juridique de sa requête, il est jugé que la Cour d’appel a violé l’article 12 du Code de procédure civile.
De plus, Monsieur [W] n’ayant pas chiffré le montant de la créance, il appartient aux juges du fonds de lui demander une évaluation de celle-ci. En rejetant la demande de Monsieur [W] au seul motif qu’il n’avait pas chiffré sa demande, il est estimé que la Cour d’appel a violé les articles 4, 5 et 12 du Code de procédure civile.
Toutefois, la Haute Cour rappelle un point fondamental, à savoir que «le travail effectué et les dépenses exposées par un indivisaire au profit de l’indivision ne peuvent donner lieu à une créance de l’indivision à l’encontre d’un coïndivisaire.»
En effet, dans pareille situation, c’est Monsieur [W] qui détenait une créance contre l’indivision, et non l’indivision qui détenait une créance contre Madame [E]….
La Cour de cassation a ainsi confirmé la solution retenue par l’arrêt d’appel.
III. Concrètement
Les rapports pécuniers entre les indivisaires sont toujours une cause de discorde. La question est toujours la même : « qui doit de l’argent à qui ? ». Contrairement à ce que bon nombre d’indivisaires peuvent croire, il y a rarement un rapport financier entre les indivisaires. Dans la plupart des cas, il y a une créance entre l’indivision et l’un des indivisaires (ou une créance entre l’un des indivisaires et l’indivision).
Dans le cas qui nous intéresse ici, les travaux réalisés par un indivisaire peuvent (s’il s’agit de travaux de conservation nécessaires ou de travaux d’amélioration) faire naître une créance détenue par cet indivisaire contre l’indivision.
IV. Source
Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 5 janvier 2023, 21-15.931
Par Excen Notaires & Conseils