QUAND UNE SARL DEVIENT UNE EURL, ATTENTION AU DEVOIR DE CONSEIL DE L’EXPERT-COMPTABLE FACE AU CHANGEMENT DE REGIME FISCAL !

30.05.23

I.  Les faits

Une SARL était devenue unipersonnelle, l’intégralité des parts sociales étant détenues par une personne physique. A défaut d’option pour le régime des sociétés de capitaux, l’EURL relève de plein droit du régime des sociétés de personnes (translucidité fiscale au sens de l’article 8 du CGI).

Cependant, l’EURL a continué de déposer des déclarations 2065 (IS).

Deux ans plus tard, l’associé unique a fait l’objet d’un redressement de son imposition sur le revenu à concurrence de 266 000 €.

Il a alors assigné son expert-comptable en responsabilité en lui reprochant de ne pas l’avoir informé du changement de régime fiscal.

II. La décision

La Haute Cour répond favorablement à l’associé unique, matérialisant le défaut de conseil de l’expert-comptable. Ce dernier a été condamné à verser à son client la somme de 266 000 €, correspondant à la totalité du redressement auquel, il n’aurait pas été exposé si l’expert-comptable avait dûment conseillé la société sur son changement de régime fiscal.

III.  Concrètement

La Cour administrative d’appel de Lyon a eu récemment l’occasion de préciser les conséquences fiscales de la transformation d’une SARL en EURL (CA Lyon n°20LY03131 18/05/2022).

Les faits étaient les suivants :

  • La SARL [X] avait été créée par deux associés en 1999 : Monsieur [A] et Monsieur [B]. La SARL était alors passible de l’IS de plein droit.
  • A la suite d’un acte de cession du 24 décembre 2001, Monsieur [B] est devenu l’unique propriétaire de l’ensemble des parts composant le capital social de la société.
  • L’EURL n’a exercé aucune option pour l’IS mais a continué à déposer des déclarations 2065 (IS).
  • A la suite d’un contrôle fiscal, l’administration a effectué des redressements en matière d’IS. Monsieur [B] a contesté la validité de ces derniers en invoquant le fait que l’EURL ne relevait pas de l’IS et que les résultats devaient être taxés à l’IR dans les mains de l’associé unique.
  • La Cour administrative d’appel de Lyon a jugé que cette société avait cessé, dès le 24 décembre 2001, d’être assujettie à l’impôt sur les sociétés et ne pouvait continuer à l’être qu’en exerçant valablement l’option pour l’imposition selon le régime propre aux sociétés de capitaux. Les juges ont ajouté que l’administration fiscale ne pouvait au demeurant pas soutenir qu’elle n’était pas informée de cette réunion des parts sociales alors que l’acte de cession a été adressé pour enregistrement à la recette des impôts.
  • Dès lors, l’EURL était fondée à soutenir qu’elle relevait, après la réunion des parts sociales entre les mains de Monsieur [B], du régime des sociétés de personnes et que c’est à tort qu’elle a été assujettie à des compléments d’impôt sur les sociétés.

L’article 8 du CGI prévoit que, à moins d’une option en faveur de l’assujettissement à l’impôt sur les sociétés, est assujetti à l’impôt sur le revenu, pour les bénéfices qu’il en retire, l’associé unique d’une société à responsabilité limitée lorsque cet associé est une personne physique.

Aux termes du 3 de l’article 206 du même code : « Sont soumis à l’impôt sur les sociétés s’ils optent pour leur assujettissement à cet impôt dans les conditions prévues à l’article 239 : (…) e. Les sociétés à responsabilité limitée dont l’associé unique est une personne physique (…) ».

L’option doit être notifiée avant la fin du troisième mois de l’exercice au titre duquel l’entreprise souhaite être soumise pour la première fois à l’impôt sur les sociétés. Toutefois, en cas de transformation d’une société de capitaux en une des formes de société mentionnées au 3 de l’article 206 ou en cas de réunion de toutes les parts d’une société à responsabilité limitée entre les mains d’une personne physique, l’option peut être notifiée avant la fin du troisième mois qui suit cette transformation ou cette réunion pour prendre effet à la même date que celle-ci.

Pour exercer valablement leur option pour l’imposition selon le régime propre aux sociétés de capitaux, les sociétés de personnes doivent soit notifier cette option au service des impôts du lieu de leur principal établissement, soit cocher la case prévue à cet effet sur le formulaire remis au centre de formalités des entreprises ou au greffe du Tribunal de commerce dont elles dépendent à l’occasion de la déclaration de leur création ou de leur modification, manifestant ainsi sans ambigüité l’exercice de leur option.

Si les dispositions en vigueur n’ont ni pour objet, ni pour effet de dispenser de ces formalités les sociétés ou groupements mentionnés au 3 de l’article 206 du Code général des impôts qui opteraient pour leur assujettissement à cet impôt alors qu’ils n’y étaient pas précédemment soumis, il en va autrement dans l’hypothèse où une société à responsabilité limitée décide, au moment de la réunion de toutes ses parts entre les mains d’un associé unique, de demeurer assujettie à l’impôt sur les sociétés. Une telle entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée est réputée avoir régulièrement exercé l’option offerte au 3 de l’article 206 si elle a opté dans ses statuts, dans le délai prévu à l’article 239, pour l’assujettissement à l’impôt sur les sociétés, et si elle a, au titre du premier exercice clos après la réunion des parts dans une même main, déclaré ses résultats sous le régime de l’impôt sur les sociétés.

IV.  Source

Cass. com. n°20-19276 05/04/2023

Par Excen Notaires & Conseils

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