I. Les faits
En 2017, à la suite d’un contrôle sur pièces, l’administration fiscale a notifié aux époux [D] une proposition de rectification par laquelle elle remettait en cause la déduction, de leurs revenus fonciers, de l’amortissement ROBIEN RECENTRÉ pratiqué les années 2014 et 2015 au titre d’un investissement réalisé en juillet 2007.
En effet, le logement a été vacant du 23 août 2014 au 21 septembre 2015, soit plus d’une année de vacance locative.
La remise en cause de l’amortissement a conduit à un complément d’impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux en raison d’un montant imposable plus élevé dans la catégorie des revenus fonciers.
Le 5 mars 2021, le Tribunal administratif a confirmé le redressement, les époux [D] ont alors relevé appel du jugement.
II. La décision
La Cour administrative d’appel a rappelé que le bénéfice de l’amortissement est notamment conditionné à l’exercice d’une option qui doit être exercée lors du dépôt de la déclaration des revenus de l’année d’achèvement de l’immeuble ou de son acquisition si elle est postérieure.
Cette option est irrévocable pour le logement considéré et comporte l’engagement du propriétaire de louer le logement nu pendant au moins neuf ans à usage d’habitation principale à une personne autre qu’un membre de son foyer fiscal.
La CAA a souligné que le h. du 1° du I. de l’article 31 dispose « […] Le revenu net foncier de l’année au cours de laquelle l’un des engagements définis au présent h n’est pas respecté est majoré du montant des amortissements déduits […] ».
Il résulte de ces dispositions qu’en cas de vacance du logement, du fait du départ du locataire au cours de la période d’engagement de location de neuf ans qu’elles prévoient, le maintien de l’avantage fiscal est subordonné à la condition que le contribuable justifie avoir accompli, sans délai, toutes les diligences nécessaires pour que son bien puisse être reloué.
La CAA rappelle que la gestion locative du bien était assurée par les époux [D] eux-mêmes. Si le bien a été loué jusqu’au 23 juin 2014, date de départ du locataire, il est resté vacant jusqu’au 21 septembre 2015.
Dès lors, si la circonstance que le bien soit demeuré vacant pendant plus de douze mois n’est pas, à elle seule, de nature à faire regarder Monsieur et Madame [D] comme n’ayant pas respecté l’engagement de location pendant au moins neuf ans, il appartient toutefois à ces derniers de justifier avoir accompli sans délai toutes les diligences nécessaires à la relocation de leur bien.
Les époux [D] ont tenté de justifier la vacance locative par l’impossibilité de trouver des locataires, compte tenu notamment d’un excédent d’offres sur le marché immobilier locatif de la commune ainsi que par le fait que des infiltrations avaient été constatées fin 2013 au niveau de la cuisine de l’appartement. Cependant, il ressort des pièces produites par Monsieur et Madame [D] eux-mêmes, qu’ils se sont bornés à publier une offre sur un site Internet d’annonces de particuliers fin août 2015, soit plus d’un an après la vacance de l’appartement. De plus, les infiltrations ne rendaient pas l’appartement impropre à la location, et ne dissuadaient pas les candidats de louer le bien. La Cour administrative d’appel considère que les époux [D] ne justifiaient pas, par les pièces produites, des diligences accomplies pour faire connaitre leur offre de location auprès d’universités ou d’établissements de formation à destination d’étudiants au cours de la période en litige, ni avoir pris les dispositions nécessaires à la conclusion d’un contrat de location, notamment en adaptant le niveau du loyer auquel ils mettaient le bien en location sur le marché. La CAA conclut donc que c’est à bon droit que l’administration fiscale a pu remettre en cause l’amortissement déduit des revenus fonciers du foyer fiscal au titre des années 2014 et 2015.
III. Concrètement
S’il est admis que le bien puisse ne pas être loué pendant l’engagement de location, la période de vacance locative ne doit pas excéder 12 mois. Le contribuable qui serait confronté à une vacance locative durable sera toujours soupçonné de négligence par les services fiscaux. La charge de la preuve va donc incomber au contribuable. Ce dernier devra donc anticiper un contrôle potentiel. Les arguments « fallacieux » tels qu’une concurrence accrue, une demande locative faible ne sont pas opposables. Le contribuable, propriétaire bailleur, doit tout mettre en œuvre pour louer le bien, même si cela doit passer par une baisse du loyer…
Notons que si la vacance locative remet en cause l’amortissement uniquement sur la période concernée, elle est considérée comme une rupture de l’engagement pour les dispositifs ouvrant droit à réduction d’impôt (Scellier, Duflot, Pinel), rupture conduisant à une reprise totale de l’avantage fiscal.
IV. Source
CAA de NANTES, 1ère chambre, 13/01/2023, 21NT01203
Par Excen Notaires & Conseils